Construire une église

                Construire une église est une source de joie. Penser et réaliser une église de haute montagne procurent les plus grands enthousiasmes, les plus intenses émotions.

                Mes premières recherches datent de l’automne 1966. Avec le curé d’Huez, père de cette église, nous avons échangé nos pensées et nos avis sur sa composition et sur sa structure, sur les symboles qu’elle devait traduire.

                Dans le même temps, le curé m’instruisait sur les équipements fonctionnels nécessaires à une église de haute montagne.

                Si je vous décris Notre-Dame des Neiges, sachez tout d’abord qu’elle se situe dans un site admirable à peu de distance de la chapelle actuelle. Elle se silhouettera sur l’horizon des montagnes au sud. Son architecture est simple, accrochée au sol, mais donnant par sa forme un sentiment d’élévation. En période de grande neige, le toit descendra jusqu’au sol. De ce cône blanc émergeront la croix et la vasque de bronze avec sa flamme. De nuit, comme de jour, l’église sera présente pour tous.

                Pour sa construction, deux matériaux dominent : le granit du pays et le bois. L’entrée est prévue à l’ouest, protégée du vent de neige par un mur plein en maçonnerie cyclopéenne, fixant les congères, et par un auvent très débordant en béton armé.

                Le porche d’entrée distribue deux accès au sanctuaire. Un accès direct, sorte de tunnel volontairement sombre avec profil à gradins successifs, appelle la méditation. Il est un sas préparatoire entre la vie libre et insouciante des champs de neige et la prière.

                Un accès parallèle a été recherché pour les skieurs arrivant directement des pistes avec leur équipement de sport. En traversant les vestiaires avec râteliers à ski, les toilettes, une salle de relaxation avec boissons chaudes, ils arriveront également au sanctuaire dans les meilleures conditions de corps et d’esprit.

                La salle de relaxation peut également servir de crèche pour les enfants en bas âge. Ils y seront gardés et surveillés.

                Une salle de plus vaste dimension devait pouvoir servir de salle de réunion, de conversation, de contact entre les fidèles eux-mêmes. Son emplacement et son accès direct avec le sanctuaire permettraient après l’office de prolonger en commun, dans une ambiance d’amitié, la communauté de pensée née de la prière.

                Le sanctuaire est de forme circulaire. Les fidèles y pénètrent de part et d’autre de l’autel. Ils sont ainsi amenés à se rapprocher du prêtre. Il est prévu 400 places assises et 400 places debout sous la galerie périmétrique.

                L’autel est situé sous le puits de lumière. Ce puits de lumière qui apparaît en façade comme dominante de la composition est partagée dans sa partie basse, en deux parties. La plus importante éclairant l’autel, l’autre les fonts baptismaux à l’extrémité du tunnel d’accès.

                Ils rappellent aussi bien la purification initiale à la vie chrétienne que l’ultime purification avant d’entrer en contact direct avec Dieu.

                La lumière vient en couleur naturelle d’une coupole en plexiglas à sa partie supérieure. Latéralement, des joues en glaces teintées distribuent symboliquement une couleur différente correspondant à la marche quotidienne du soleil, du clair matin au crépuscule.

                La décoration sera obtenue par des moyens simples. Sols et murs en pierres, charpente en lamellé collé, vernis. Vitraux ou composition en plaques teintées et ciment en partie haute des murs. Fresques, tapisseries derrière l’autel. L’autel est en pierre. Bancs modernes suivant dessin spécial.

                La population de l’Alpe varie. En saison elle est principalement composée des autochtones et se limite à 400 habitants. Elle passe à plus de 10 000 habitants en saison d’hiver. Ce mouvement de population justifie l’existence d’une chapelle paroissiale. Elle est prévue en crypte, sous le sanctuaire. Elle peut recevoir 50 fidèles. Deux confessionnaux sont incorporés dans la superstructure. Cette chapelle serait très sobre et volontairement dépouillée de toute décoration.

                A ce niveau inférieur, sont également prévues la chaufferie et la morgue.

                La sacristie est au nord avec accès direct à la chapelle paroissiale et au sanctuaire. Son volume s’intègre dans l’auvent de toiture formant galerie.

                La cure est à l’opposé, de distribution moderne, mais simple. Elle est aussi reliée directement au sanctuaire par l’intermédiaire de la salle de réunion.

Louis MAROL, architecte